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COMMENTAIRE DE

Un saut technologique dans la reconnaissance de la voie par Géoradar

Pour la maintenance des voies, nous misons de plus en plus sur une observation complète, qui prend en compte tous les facteurs et paramètres importants, et ce, dans l’intérêt de la rentabilité économique. Les données à haute résolution sur les différents composants de la voie en constituent la base. Le Géoradar ou Ground Penetrating Radar (GPR) y apporte une contribution essentielle.

COMMENTAIRE DE


GIUSEPPE STACCONE (ingénieur diplômé), PDG chez Ground Control GmbH, Munich

C’est désormais devenu le processus standard de prospection et d'assurance-qualité de la superstructure et de l'infrastructure ferroviaires. Grâce au développement continu de la technologie de mesure et d'analyse, la pertinence des données de mesure pourra ainsi être améliorée. La dernière avancée technologique est donnée par l’utilisation de l’intelligence artificielle (IA).

L'enregistrement précis et complet de l’état de la plateforme et de la superstructure de la voie est indispensable pour réaliser une planification efficace et une mise en œuvre rentable des mesures de maintenance. Pendant des décennies, l'exploration des sols était uniquement basée sur des forages d'essai et des tranchées. Bien entendu, une prospection complète n’est pas envisageable dans ces conditions. Dans les années 1990, nous avons évalué, pour la première fois dans des recherches scientifiques, si le géoradar était adapté à l'exploration des sols dans le secteur ferroviaire.

Avec cette méthode sans contact, des ondes électromagnétiques pénètrent dans la structure de la voie jusqu’à une profondeur de 2,5 m et sont réfléchies différemment selon la nature du sol. Les données mesurées par les ondes réfléchies sont enregistrées dans des radargrammes. Cela permet d'enregistrer une grande variété de paramètres, notamment l’humidité, le degré de salissure et l'évolution des différentes délimitations des couches.

L’introduction du géoradar dans le secteur de la construction ferroviaire a permis pour la première fois de réaliser une prospection complète de la structure de la voie. Il est vite devenu le procédé standard car il dépasse en de nombreux points le procédé de sondage utilisé auparavant. Ainsi, par exemple, il n'est pas nécessaire de fermer la voie et il est possible d’analyser des voies et des réseaux entiers dans un court laps de temps. Des appareils récents peuvent être installés sur n’importe quel engin et peuvent également être alimentés en autonome grâce à une batterie. Cela permet de les utiliser sur des machines de travaux et même sur des trains réguliers, où la mesure réalisée sous des contraintes réelles devient plus significative.

Une technologie de pointe sophistiquée

Le développement constant de la technique permet de réaliser des mesures de plus en plus rapides et de très haute qualité. Le système électronique ultra-performant permet désormais d'atteindre des vitesses de mesure allant jusqu’à 300 km/h. Différentes fréquences d’antennes assurent une résolution optimale à différentes profondeurs. La qualité des données est encore améliorée à l’aide de systèmes de déclenchement spéciaux qui effectuent uniquement les mesures entre les traverses. La combinaison entre le DGPS et le radar Doppler permet également de déterminer la position avec une précision inférieure à 0,3 m.

De grandes avancées dans l'analyse des données

Ces dernières années, c’est en particulier dans le domaine de l’analyse des données de mesure que les avancées sont significatives, principalement grâce aux ordinateurs performants et aux logiciels d’analyse. Le développement de filtres numériques fut un progrès important car ceux-ci améliorent nettement la qualité des données. En conséquence, les structures au sein de la voie, auparavant cachées, peuvent désormais être enregistrées et évaluées. Cependant, la qualité de l’interprétation des données dépendait jusqu’à récemment de la compétence spécialisée des analystes.

Un autre récent bond technologique significatif est l’utilisation de l’I.A. dans l'analyse des données. A l’aide d’algorithmes d’apprentissage automatique, le logiciel apprend à interpréter correctement les échantillons sur les radargrammes. Chaque kilomètre analysé augmente ainsi la précision. Désormais, le logiciel d’analyse est si performant que même les spécialistes expérimentés n’atteignent plus leur qualité et leur reproductibilité. L’analyse automatisée des données recueillies par les radars augmente également les possibilités de visualisation et d’intégration d'autres données. Les résultats de mesure peuvent être clairement représentés dans des diagrammes ainsi que sur des cartes numériques et également être facilement intégrés dans des bases de données.

Désormais, l’I.A. bat même les spécialistes expérimentés en termes de qualité et de reproductibilité dans l’analyse des données de mesures.

Un important fournisseur de données pour les « Big Data »

Les entreprises ferroviaires misent de plus en plus sur les « Big Data » dans le cadre de la gestion du cycle de vie. Les mesures géoradar réalisées à l’aide de machines en sont une source de données importante. Un bon exemple pour la consolidation et l'analyse de diverses données de voies est le système d'analyse de la géométrie de la voie NATAS des ÖBB (chemins de fer autrichiens). Il simplifie notamment la reconnaissance précoce des tendances ainsi que la création et l’optimisation des prévisions de maintenance, particulièrement grâce aux données recueillies par les géoradars. Les wagons de mesure équipés d’un géoradar enregistrent en un seul passage non seulement la géométrie externe de la voie mais également l’état du lit de ballast et de la plateforme. C’est un pas de plus vers la mise à disposition complète des données de la voie ferrée depuis une source unique.

Des domaines d’application divers

Il faut s’attendre à ce que le géoradar gagne encore en importance, non seulement pour les inspections préventives mais également pour la documentation des travaux de construction tels que l'installation de la couche de forme au-dessus de la plateforme ou de l’épaisseur de la couche d'assise. Le système a déjà été approuvé par les ÖBB dans le but de fournir des justificatifs relatifs aux prestations réalisées. Les machines de construction ferroviaire de la société Swietelsky sont déjà équipées de géoradar afin de fournir ce type de preuves.

Le procédé est également utilisé pour optimiser les méthodes de construction. La détection précoce d’obstacles ou de dangers tels que des fondations en béton, des goulottes de câbles et des vestiges de guerre évite les temps d'arrêts, les dommages coûteux et réduit l’usure, en particulier pour les grandes machines de dégarnissage-criblage et de renouvellement de la voie.

Des applications futures à l’horizon

Des applications supplémentaires se dessinent petit à petit. Ainsi, il est tout à fait envisageable que de nombreuses machines de travaux de voie soient équipées de géoradars dans les dix prochaines années. A cette fin, Ground Control a récemment lancé un partenariat technologique avec Plasser & Theurer. Sur la base des données radars relevées en direct, il a été possible de commander les performances d’une machine en fonction de la nature du sol et d’automatiser les processus de travail. Un grand potentiel réside dans de telles applications et doit être exploité en termes d'efficacité et de rentabilité. Compte tenu des développements rapides des technologies de mesure et d’analyse, de tels systèmes ne tarderont probablement pas à voir le jour. L’importance du géoradar dans le secteur de la construction ferroviaire continuera sans aucun doute à progresser.

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